« J’ai été choquée de lire dans un récent rapport du WWF qu’au cours du dernier demi-siècle, pas moins de 73 % de la biodiversité ont disparu. Il ne reste que peu de temps pour inverser la tendance. Par exemple, en investissant dans des solutions cruciales. Quiconque investit aujourd’hui encore dans des entreprises qui contribuent à la déforestation, à la pollution ou à la destruction de la nature fait preuve d’un manque flagrant de leadership.
Il est impératif de cesser de financer l’agriculture non durable
Les conséquences de la perte de biodiversité sont si importantes que si la tendance se poursuit au rythme actuel, aucun secteur d’activités ne sera épargné. Actuellement, nous consommons annuellement l’équivalent de 1,75 planète pour répondre à nos besoins en ressources.
D’après les Nations unies, nous épuisons la Terre à un point tel qu’un huitième des espèces végétales et animales est aujourd’hui quasiment éteint.
L’agriculture est au cœur du problème. Et plus spécifiquement la déforestation intensive, l’utilisation de pesticides et la dégradation des sols qui vont de pair avec l’agriculture à grande échelle. Il est alarmant de constater que pas moins de 90 % de la déforestation tropicale et 70 % de la perte de biodiversité sont imputables à une extension de l’agriculture.
Ironiquement, c’est notre appât du gain et notre éternelle envie d’avoir accès à une alimentation « bon marché » qui épuise les sols, de sorte que les rendements s’amenuisent au fil du temps, les prix grimpent et les futures récoltes sont compromises. Chaque année, on enregistre une perte de près de 577 milliards de dollars due à la disparition des pollinisateurs, qui s’explique principalement par les pesticides. Il suffit de voir la montée en flèche des cours du cacao pour constater que nous sommes d’ores et déjà dans ce scénario. Les agriculteurs des zones rurales africaines doivent faire face à des conditions climatiques extrêmes, à l’extinction des pollinisateurs et à d’innombrables maladies au sein des élevages.
Celles et ceux qui financent la destruction de la nature ne sont pas des leaders
Cela va au-delà de la faune et la flore. L’intensification de la perte de biodiversité augmente également les risques que nous soyons à nouveau confrontés à des épidémies et des pandémies comme le COVID-19. Et chaque événement successif sera plus challengeant que le précédent vu l’épuisement de nombreuses sources d’alimentation, l’aggravation des maladies et les conditions climatiques de plus en plus extrêmes.
La planète en a assez d’entendre des excuses. Il n’existe aucune bonne raison de (continuer à) financer directement ou indirectement des entreprises qui nuisent à notre planète. Les institutions financières qui continuent à investir dans ces pratiques font preuve d’un manque cruel de leadership et de vision. C’est l’essence-même du concept de leader : diriger ! Les entreprises qui ne changent pas de modèle économique ne sont que des suiveurs passifs. Les dirigeants qui ne sont pas capables de mettre leur entreprise sur la voie d’un avenir économique durable ne sont pas des leaders. Et tout le monde le sait. On aura beau construire autant d’éoliennes qu’on veut, cela ne changera rien si on continue à financer la destruction de la nature.
Hélas, dans ce contexte, le secteur financier joue un rôle destructeur. Dans leur quête incessante de gains, les institutions financières ont permis aux exploitations agricoles de prendre de plus en plus d’ampleur et de nuire davantage à la planète qu’elles n’auraient pu le faire en restant indépendantes. Notre secteur n’a peut-être pas abattu lui-même les arbres, mais il a fourni les moyens requis pour acheter les haches. C’est pourquoi il incombe désormais aux véritables leaders du secteur de remédier à cette situation – c’est leur devoir et leur prérogative. La première chose à faire est de cesser de financier les entreprises qui détruisent notre planète. C’est aussi simple que cela.
Les investissements positifs pour la nature sont partout autour de nous
L’étape suivante est nettement plus optimiste et, à titre personnel, elle m’inspire beaucoup. Nous devons canaliser nos moyens financiers, nos stratégies et nos influences vers des entreprises et des projets qui redonnent vie à la nature. Il existe une foule de solutions rentables et inclusives qui ont un besoin urgent de financement.
Par exemple, un de nos fonds a récemment investi dans une entreprise qui cultive des algues en pleine mer. Au-delà d’être un magnifique engrais et aliment pour animaux – de surcroît durable ! –, les algues, lorsqu’elles sont issues d’une culture responsable, peuvent également améliorer la biodiversité marine et la qualité de l’eau. En outre, elles sont capables de stocker du CO2. Les entreprises innovantes de ce genre m’inspirent beaucoup.
Elles apportent la preuve que les investissements rentables d’un point de vue économique et écologique existent depuis longtemps. Ces entreprises souhaitent se développer et il suffit pour nous de les y aider. Et qu’avons-nous à y gagner ? Une planète, tout simplement.
Financer l’avenir
La conférence des Nations unies sur la biodiversité invitera cette année à allier la parole aux actes. L’heure n’est plus à la signature de déclarations et aux discours pleins de bonnes intentions. C’est maintenant qu’il faut arrêter de financer la destruction et commencer à investir dans des solutions.
Nous souhaitons coopérer avec d’autres entreprises ou institutions qui sont en quête d’investissements rentables dans la nature. Le moment n’a jamais été aussi bien choisi, et personne d’autre que nous, qui maîtrisons les arcanes de la finance, n’est mieux placé pour le faire. Ensemble, nous pouvons guérir la planète pour les générations à venir. »
Traduction d’un article publié en néerlandais sur le site IEX Profs.
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